The Thing, John Carpenter, 1982.
Une équipe de chercheurs Américains en faction en Antarctique se retrouve confrontée à ce qui semble être les derniers survivants parmi leurs collègues Norvégiens, situés dans une base aux alentours. Ces derniers tentent d'abattre un pauvre chien de traineau qui arrive à tracer la route jusqu'au camp Américain. Les Norvégiens semblent si déterminés à tuer la bête qu'ils en viennent à tirer sur les autres, qui sont alors forcés de les abattre. Le groupe de camarades recueille le chien sans poser de questions, sans savoir qu'ils viennent d'amener au cœur de leurs murs la Chose, entité extra-terrestre symbiotique et imitatrice parfaite, et créature répugnante affamée de chair fraiche...
The Thing de Carpenter est avec Scarface de De Palma l'un des premiers grands remakes de l'Histoire du Cinéma, et il faut dire que la concurrence ne parait pas, à l'heure actuelle, extrêmement rude dans ce domaine. Mais passons, là n'est pas le propos. Remake donc, du film de Christian Niby et Charles Lederer The Thing from another World, lui-même adaptation de la nouvelle Who Goes There? de John W. Campbell Jr., ce chef-d'œuvre ultime (et je pèse mes mots) de l'horreur est peut-être le plus abouti du maitre Carpenter, que j'affectionne tout particulièrement. Bien sûr, je parle avec une certaine objectivité en affirmant cela, Snake Plissken trouvera toujours trop de grâce à mes yeux pour être placé derrière, et le Big John nous a offert tellement de bons films qu'il est difficile de les départager. Mais The Thing est une telle réussite, à tout point de vue, qu'il n'usurpe aucunement son titre de film d'horreur culte.
Le réduire à ceci serait d'ailleurs quelque peu maladroit. Le film est également empreint d'une atmosphère de science-fiction non étrangère au style de Carpenter, et le suspense prime ici d'avantage sur l'horreur pure. Le film n'est donc pas excessivement violent, ni réellement gore, si l'on omet l'esthétique répugnante à souhait de la Chose et ses méthodes quelque peu dégoutantes pour s'emparer d'un corps et décimer les différents protagonistes. Parlons en d'ailleurs, de l'esthétique de la créature. 30 ans après, les animatroniques qui donnent vie à la Chose n'ont pas pris une ride, et ont toujours autant d'impact. Les effets spéciaux forcent le respect, il faut le dire. La Chose est immonde, mais impressionnante, et aussi malsaine qu'inventive. Probablement l'un des monstres les plus réussis et effrayants jamais vus à l'écran.
Oui donc, comme je le disais, le suspense atteint des sommets avec The Thing (ouais je sais je dis la même chose avec Buried un peu plus bas, mais bon, ça reste vrai, dans un tout autre style). C'est fou comme le huis-clos est propice à l'angoisse. Les différents protagonistes, à la base collègues et amis, se mettent à douter les uns des autres, tout en étant exterminés un par un, lentement mais sûrement. La terreur et la paranoïa s'installent progressivement, chez les personnages au même titre que chez le spectateur. Ainsi, on reste scotché à son siège, le rythme est parfaitement soutenu grâce à cette constante appréhension de son prochain, cette peur omniprésente de périr, en étant coincé au beau milieu de l'environnement le plus dangereux sur Terre, et ce même sans la présence de la Chose. Quoi de mieux que l'Antarctique pour piéger une bande de pauvres gars, pour les couper du reste du Monde, et les confronter à un extra-terrestre qui ne craint qu'une chose, la chaleur?
Dans un sens, on pourrait comparer The Thing à un autre chef-d'œuvre du genre, et je parle bien sûr de l'Alien de Ridley Scott. Les deux films ont nombre de similitudes, c'est vrai, mais pour notre plus grand plaisir, ils parviennent tous deux à avoir une identité propre, et puissante. L'ambiance de The Thing en fait un parfait film d'horreur, au delà de ses effets spéciaux et de la violence dont il use. La musique du maestro Ennio Morricone, curieusement teinte du style de Carpenter (ce que je dis ici suffit à prouver que la bande originale du film est géniale) participe grandement à la froideur captivante du film (j'ai un faible pour les musiques du film bien synthétisées des années 80). Kurt Russell, figure emblématique chez ce cher Carpenter, adopte ici un rôle à contre mesure : Il n'est plus le héros qui fracasse tout le monde sans sourciller, mais un simple humain terrorisé, au même titre que ses camarades d'infortune. Enfin, il demeure toujours aussi classe, tout de même, et on devine d'ailleurs dès le départ que c'est lui qui s'en sortira "le mieux" durant le film...
The Thing a su garder au fil du temps toute la force des genres auxquels il se lie, toute la vigueur de sa mise en scène, et toute la virtuosité de son auteur.
Une perle brute qui n'a pas pris une ride. Vous n'avez aucune excuse si vous ne l'avez pas vu.
"Somebody in this camp ain't what he appears to be. Right now that may be one or two of us. By spring, it could be all of us"